DUPORT
Autrefois, simple et crédule,
Je croyais à la vertu ;
Messieurs, de ce ridicule,
Ah ! je suis bien revenu.
Par le fossé du scrupule
Je sautai dans le château
Qu'habite monsieur veto. (bis)

Adrien Duport (1759 - 1798)
BERTRAND (Marine)
J'ai menti, la chose est claire,
J'ai trompé la nation ;
Pour cela du ministère
Faut-il me chasser ?
Oh! non. Si l'on était si sévère,
Un ministre sans trembler
Jamais ne pourrait parler. (bis)
LESSART (Affaires étrangères)
De Necker, disciple habile,
Et plus charlatan que lui,
Je suis en complot fertile,
Et des conjurés l'appui.
Mais, dans la liste civile,
Je puise mille vertus...
Voyez le Coq et l'Argus. (bis)

Antoine Claude Nicolas Valdec de Lessart
(1741 - 1792)
NARBONNE (Guerre)
J'ai fait, avec bien du zèle,
Mainte campagne... à Paphos,
Pris d'assaut... mainte ruelle,
Fait la guerre... en madrigaux.
La patrie est une belle
Dont j'ai ravi les faveurs
En lui disant des douceurs. (bis)
TARBE (Finances)
Pour remplir mon ministère,
Grands Dieux ! que je fais d'efforts !
Je dors et bois et digère,
Je digère et bois et dors.
Je ne m'inquiète guère,
Lorsque j'ai ma pension,
Si l'impôt se paye ou non. (bis)
CAHIER
Pour le clergé réfractaire,
Pour les nobles, indulgent,
Pour les Jacobins, sévère ;
Comme Léopold, Feuillant,
Je ne fis au ministère
Qu'un trait dont on soit content,
Messieurs, c'est en le quittant. (bis)
|
Allons enfans de la Patrie
Le jour de gloire est arrivé,
Contre nous de la tyrannie
L'étendart sanglant est levé.
Entendez vous dans les campagnes
Mugir ces féroces soldats
Qui viennent jusques dans vos bras
Égorgés, vos fils vos compagnes.
Refrain
Aux armes,
Citoyens formez vos bataillons
Marchez, marchez qu'un sang impure, abreuve vos sillons
Marchons, qu'un sang impure, abreuve nos sillons.
Que veut cette horde d'esclaves
De traitres, de rois conjurés.
Pour qui ces ignobles entraves,
Ces fers long tems préparés (bis)
Francais pour nous, ha quel outrage ;
Quels transports il doit exiter
C'est nous qu'on ose méditer
De rendre a l'antique esclavage.

La Marseillaise.
Quoi, des cohortes étrangères,
Feraient la loi dans nos foyers ;
Quoi, ces phalanges mercenaires
Terrasseroient nos fiers guerriers ; (bis)
Grand Dieu par les mains enchainées
Nos fronts sous le joug se ploieroient,
De vils despotes deviendroient
Les maitres de nos destinées ;
Tremblez tyrans et vous perfides,
L'opprobré de tous les partis.
Tremblez vos projets parricides
Vont enfin recevoir leur prix, (bis)
Tous est soldat pour vous combattre ;
S'ils tombent nos héros,
La terre en produit de nouveaux
Contre vous tous préts à se battre.
Français en guerriers magnanimes
Portez ou retenez vos coups ;
Epargnez ces tristes victimes ;
A regrets s'armant contre nous, (bis)
Mais ces despotes sanguinaire ;
Mais ces complices de Bouille,
Tous ces tigres qui sans pitié
Déchirent le sein de leur mère.
Amour sacré de la Patrie,
Conduis, soutiens nos bras vengeurs,
Liberté, liberté chéri,
Combats avec tes défenseurs ; (bis
Sous nos drapeaux que la Victoire
Accoure a tes màles accens ;
Que tes ennemis expirans
Voient ton triomphe et notre gloire.
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Tombez à la voix de Torné,
Bizarre hiéroglyphe,
Dont l'orgueil seul avoit orné
L'estomac d'un pontife.
Rochets, soutanes et rabats,
Déguisemens fantasques,
Il falloit bien vous mettre à bas
Puisqu'on défend les masques.
Un moine perdra-t-il le don
Mesdames, de vous plaire,
Quand il n'aura plus son cordon
Ou bien son scapulaire ?
Ah connoissez mieux frère Roc
Et son talent céleste
Qu'importe qu'il perde son froc,
Quand sa vertu lui reste ?

Religieuse de l'abbaye de Saint-Rémi (1760).
Et vous, dont les charmants appas
Se cachoient sous la toile,
Soeur Luce ne regrettez pas
La guimpe ni le voile.
Venez d'un costume nouveau
Essayer la parure
L'Amour vous offre son bandeau,
Et Vénus sa ceinture.
Bénissons, nos législateurs,
Ces fameux philosophes ;
Leur décret charme les tailleurs
Et les marchands d'étoffes.
Heureux décret, qui des nonains
Au monde rend les charmes,
Qui fait la barbe aux capucins
Et qui chausse les carmes.
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Veillons au salut de l'empire,
Veillons au maintien de nos droits (lois)
Si le despotisme conspire
Conspirons la perte des rois
REFRAIN
Liberté!
Liberté!
Que tout mortel te rende hommage
Tyrans, tremblez!
Plutôt la mort que l'esclavage,
C'est la devise des Français.
Liberté! Liberté!
Que tout mortel te rende hommage
Tyrans, tremblez!
Vous allez expier vos forfaits
Plutôt la mort que l'esclavage,
C'est la devise des Français.

Soldat de Valmy -
Nicolas Toussaint Charlet (1792-1845).
Du salut de notre patrie
Dépend celui de l'univers;
Si jamais elle est asservie,
Tous les peuples sont dans les fers.
Ennemis de la tyrannie,
Paraissez tous, armez vos bras
Du fond de l'Europe avilie,
Marchez avec nous aux combats.
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Seigneurs aristocrates,
Où donc est le cercueil
Qu'aux bourgeois démocrates
Préparait votre orgueil ?
Nous devions expirer, à vous entendre dire :
Peut-être, nous vous en croyons,
Peut-être en effet nous mourrons,
Mais ce sera de rire.
Gonflés d'impertinence,
Comme sont tous les sots,
Vous disiez que la France
Etait sans généraux.
Eh bien, qu'en pensez-vous !
Kellermann et Custine,
De leurs sabres républicains
Quand ils font la chasse aux faquins,
N'ont pas mauvaise mine ?
Dédaignez-vous encore
Le brave Dumouriez ?
Vous avez fait éclore
Sur son front des lauriers.
Nous avons un Ajax, nous avons un Ulysse,
Qui prend des villes par raison,
Tout en rimant une chanson,
Sans rêver à la Suisse.

Duc de Brunswick (1735 - 1806).
Brunswick et sa cohorte,
Au très vaillant Condé
Devait prêter main-forte,
Mais il s'est évadé.
Voyons donc quel malheur en tout vous accompagne !
Nous vendrons vos châteaux jolis ;
Vous irez bâtir, mes amis,
Des châteaux en Espagne.
Vos pièces de campagne
Devaient brûler Paris :
Pour le coup la montagne
Enfante une souris.
Il ne vous restera, pauvres soutiens du trône,
Que des yeux pour pleurer en vain,
Un sac, et tout juste une main
Pour demander l'aumône.
|
Madame Veto avait promis (bis)
De faire égorger tous Paris. (bis)
Mais le coup a manqué,
Grâce à nos canonniers.
REFRAIN
Dansons la Carmagnole
Vive le son, (bis)
Dansons la Carmagnole
Vive le son du canon.
Monsieur Veto avait promis (bis)
D'être fidèle à son pays; (bis)
Mais il y a manqué,
Ne faisons plus quartié.
Antoinette avait résolu (bis)
De nous faire tomber sur le cul ; (bis)
Mais le coup a manqué
Elle a le nez cassé.

Femme en habit de sans-culotte.
L'aristocrate a pour amis (bis)
Tous les royalistes à Paris (bis)
Ils vous les soutiendront
Tous comm' de vrais poltrons.
Amis, restons toujours unis, (bis)
Ne craignons pas nos ennemis (bis)
S'ils vienn'nt nous attaquer,
Nous les ferons sauter.
Oui, je suis sans-culotte, moi (bis)
En dépit des amis du roi; (bis)
Vivent les Marseillais,
Les Bretons et nos loix.
Oui, nous nous souviendrons toujours (bis)
Des sans-culottes des faubourgs (bis)
A leur santé buvons
Vivent ces francs lurons.
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MADAME ENGUEULE
J'aurons l'divorce, ma commère,
En dépit de nos calotins.
Avec leux quatre mots latins
Du mariage, ils font eunn'galère.
Et l'sacrement nous plonge encor,
Au fond d'l'enfer, après la mort.
Jeune brebis douce et gentille
Tombe à vieux vilain loup garou
On met du dur avec du mou
Pour l'intérêt de la famille.
La jeune fille n'en veut pas
Mais papa l'veut ; faut sauter l'pas.
C'te pauvre enfant qu'on tyrannise
Obéit, et n'ose broncher.
Comme l'agneau va cheux l'boucher,
Telle elle va triste à l'église.
Sa bouche y dit, oui, son coeur, non,
V'la qu'est bâclé ; l'mariage est bon.
MADAME SAUMON
N'y a pu moyen de s'en dédire,
Par l'indissolubricité,
Du bon Dieu c'est la volonté
Qu'all souffre un éternel martyre,
V'la comm'vous raisonne un cagot,
Qui d'son Dieu fait un ostrogot.
MADAME ENGUEULE
Faut d'la vertu, pu gros qu'un ange,
Pour que l'mâtin n'soit pas cocu
Bientôt la tête emporte l'cul,
Faut ben gratter où ça démange,
Un galant gratte, et par un sort,
Vl'a ça démange encor pu fort.

Le divorce - Lesueur (1760 - 1802).
MADAME SAUMON
Pour la vertu faut être libre,
L'choix qu'on fait soy même est l'seul bon,
L'mariage est comme le canon
Faut qu'son boulet soit de qualibre,
Sinon il rate, ou porte à faux
Et c'est j'ter sa poudre aux moignaux.
MADAME ENGUEULE
Avec l'divorce mon chien d'homme
N'me f'ra pu tant son embarras;
Il n'vendra plus jusqu'à nos draps
Pour payer ses d'misquiés d'rogôme
Il sçaura que j'peux l'planter là
Et ça seul le corrigera.
MADAME SAUMON
Et l'mien donc, qui porte à sa gueuse
C'que j'gagne, et jusqu'à mes juppons.
J'en f'ray justice, j't'en réponds.
Tu verras c'te belle engueuseuse,
Drès que l'divorce sera v'nu,
Les yeux pochés, et l'cul tout nu.
JEAN MANNEQUIN
Quel gyrie et quel bavardage
S'lon vous tous l'zhommes sont des gueux.
Vous raisonnés l'a touttes deux,
Comme des con-seillers d'village,
Si chez nous, l'y a ben des coquins
C'est qu'chez vous l'y a ben des catins.
LE MEME
Nous faut l'divorce, pour bien faire,
Luy seul rendra l'mariage heureux.
Quand on peut s'quitter tous les deux
On y prend garde, on cherche à s'plaire.
Com ça j'verrons moins d'libertins
Moins de cocus, moins de catins.
D'ailleurs que f'roient les droits de l'homme
Sans l'divorce point d'liberté
Leux indissolubricité
Est eune chaîne all vient de Rome,
J'lavons traînée assez long-temps
Plus d'chaîne, et qu'les Français soient francs.
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L'émigrant ou émigrette était un jouet, l'ancêtre
du yoyo.
Je vois quantité de machines
Amusant des mains enfantines,
Et j'entends dire à chaque instant :
Saute, saute, mon émigrant.
Ce jeu n'est pas fait sans malice ;
Car on voit l'acteur et l'actrice
Au spectacle s'en amusant.
Saute, saute, mon émigrant.
Pour que cette machine tourne,
Il ne faut pas qu'elle séjourne,
Ainsi que fait un noble errant.
Saute, saute, mon émigrant.
Tantôt à Turin se retire ;
Ensuite on le voit dans l'Empire ;
Tantôt il est dans le Brabant.
Saute, saute, mon émigrant.
A la loi qui l'appelle en France,
Ce matin, avec arrogance,
Y répond d'un ton menaçant !
Saute, saute, mon émigrant.
Mais le Français de lui se joue,
En tournant sa petite roue,
La remontant, la rabaissant.
Saute, saute, mon émigrant.
Dans Coblentz, dit-on, est le trône
Du grand Condé, qui toujours prône
Qu'il veut venir en conquérant.
Saute, saute, mon émigrant.
Qu'il vienne, on l'attend de pied ferme ;
Car sa menace est d'un long terme.
On lui dira, s'il est méchant :
Saute, saute, mon émigrant.

Femme jouant avec une émigrette (1791).
Soutenu des amis du pape,
De loin le noble mutin jappe ;
Mais il n'est guère entreprenant.
Saute, saute, mon émigrant.
Craint-il que ses soldats se mouillent,
Ou bien que leurs fusils se rouillent ;
Sont-ils soldats du Vatican ?
Saute, saute, mon émigrant.
Plusieurs d'eux craignent que leurs têtes
Ne soient le prix de ces conquêtes.
Leur faible coeur s'en va battant.
Saute, saute, mon émigrant.
Nos braves réquisitionnaires
Iront bientôt, hors des frontières,
Chanter, baïonnette en avant :
Saute, saute, mon émigrant.
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