1792
(de juillet à décembre)

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- en cours de rédaction -


1er juillet
L'Assemblée décide que les séances des corps administratifs seront publiques.
Une délégation de la section de la Croix-Rouge déclare à l'Assemblée que "l'horizon politique de la France se couvre de nuages ; la foudre gronde, elle est prête à éclater (...) le peuple entier, à demi levé, n'attend plus que le signal de ses représentants", elle demande "un grand exemple de sévérité, pour effrayer les conspirateurs", et l'enjoint de frapper "un grand coup" et de déclarer "la patrie en danger".

2 juillet
Afin de contourner le veto du roi sur le camp des Fédérés, l'Assemblée décrète que les Fédérés (dont quelques bataillons sont déjà en route pour Paris) assisteront à la fête de la Fédération du 14 juillet à Paris avant de se rendre au camp de Soissons, désigné par les précédents décrets pour accueillir le rassemblement de la réserve.
Un décret de l'Assemblée licencie l'état-major de la garde nationale dans les villes d'au moins 50 000 habitants.
Le bataillon des Fédérés de Marseille se met en route pour Paris.

3 juillet
Pierre Vergniaud Dans un long discours, Vergniaud s'attaque au roi, s'interrogeant sur le fait "que ce soit précisément au dernier période de la plus violente crise, et sur les bords du précipice où la nation peut s'engloutir, que l'on suspende le mouvement de nos armées ; que, par une désorganisation subite du ministère, on ait brisé la chaîne des travaux, rompu les liens de la confiance, livré le salut de l'empire à l'inexpérience de mains choisies au hasard, multiplié les difficultés de l'exécution, et compromis son succès par les fautes qui échappent, même au patriotisme le plus éclairé, dans l'apprentissage d'une grande administration". Il ajoute que selon "la Constitution, chap. II, sect. I, art. 6, Si le roi se met à la tête d'une armée et en dirige les forces contre la nation, ou s'il ne s'oppose pas par un acte formel à une telle entreprise qui s'exécuterait en son nom, il sera censé avoir abdiqué la royauté". Or, "c'est au nom du roi que les princes français ont tenté de soulever contre la nation toutes les cours de l'Europe (...) ; c'est pour venir au secours du roi que les émigrés sollicitent et obtiennent de l'emploi dans les armées autrichiennes (...) ; c'est (...) pour le maintien de la splendeur du trône que le roi de Bohême et de Hongrie nous fait la guerre". Aussi, puisque le roi ne s'est pas opposé par un acte formel "aux victoires qui se remportaient en [son] nom", il n'est plus rien "pour cette Constitution [qu'il] a si indignement violée, pour ce peuple [qu'il] a si lâchement trahi". Il propose donc de déclarer la patrie en danger et, puisque le roi ne retire pas ses vetos, que les ministres soient responsables des troubles intérieurs qui auraient la religion pour prétexte (troubles qui pourraient être fomentés par des prêtres réfractaires), ainsi que de toute invasion du territoire, faute de précaution pour remplacer à temps le camp dont l'Assemblée avait décrété la formation. Son discours est vivement applaudi par la majorité des députés.

5 juillet
Décret de l'Assemblée définissant les mesures à prendre quand la patrie est en danger.

Nuit du 6 au 7 juillet
Convaincus de n'avoir pas tout mis en oeuvre (notamment en refusant de décréter la loi martiale) pour assurer la sécurité du roi lors de la journée du 20 juin, et soupçonnés d'avoir aidé les émeutiers, le maire de Paris, Pétion et le procureur de la Commune, Manuel, sont suspendus de leur fonctions par le conseil du département de Paris.

7 juillet
Le baiser Lamourette A l'Assemblée nationale, durant la séance du matin, Lamourette, évêque constitutionnel et député de Lyon, convie, à l'occasion de la discussion sur les mesures de sûreté générale, tous les partis à faire taire leurs querelles et à se reconcilier car les gens honnêtes "ont beau être divisés d'opinions, et se débattre sur les moyens de parvenir au même but, il n'entre jamais ni passions, ni haines dans leurs discussions, parce qu'ils ont une unité de fins, qu'ils sont sûrs l'un de l'autre, et qu'après avoir manifesté des opinions divergentes, éclairés par une discussion franche, ils se rencontrent toujours au point de la probité et de l'honneur". Et, puisque leurs divergences d'opinion portent sur l'institution d'une république ou d'une monarchie constitutionnelle (les deux chambres), il demande "que ceux qui abjurent également et exècrent la république et les deux chambres se lèvent" et qu'ils déclarent "ne jamais souffrir, ni par l'introduction du système républicain, ni par l'établissement des deux chambres, aucune altération quelconque à la Constitution". Dans un même mouvement, tous les députés de gauche se lèvent et se mêlent à ceux de droite, qui les accueillent en les embrassant. L'enthousiasme est tel que l'Assemblée envoie sur le champ à Louis XVI le procès-verbal de la séance pour l'inviter à se joindre à elle et l'acclame aux cris de "vive la nation, vive le roi" lorsque ce dernier la rejoint enfin, accompagné de ses ministres. Enfin, elle engage, par décret, la municipalité et les tribunaux institués de Paris à "redoubler de zèle et d'activité pour le service des fonctions qui leur sont déléguées par la Constitution, et à offrir, par leur conduite, l'exemple de l'union que l'Assemblée nationale vient de donner à tout l'empire". Quelques minutes plus tard, elle apprend la suspension de Pétion et Manuel.
A la séance du soir, le roi, ne voulant pas statuer sur la décision du directoire de la ville, demande à l'Assemblée de s'en charger... ce qu'elle refuse.

8 juillet
Tandis que Paris gronde, furieux de la destitution de Pétion et Manuel, Billaud-Varenne met en doute, au club des Jacobins, la sincérité des députés quant à leur "étrange accolade", ajoutant que "la veille de toutes les grandes conspirations contre la liberté a été cimentée par ces réunions parjures".
La section des Gravilliers et la section de la Place Royale font porter à l'Assemblée deux pétitions qui réclament la réintégration de Pétion et Manuel.
Dans le Gard, le comte de Saillans s'empare du château de Banne.

9 juillet
Dans un long discours, Brissot rend le roi, ses ministres et certains chefs de l'armée responsables de mettre "la patrie est en danger", et ajoute que "frapper sur la cour des Tuileries, c'est frapper tous les traîtres d'un seul coup ; car cette cour est le point où tous les fils de la conspiration aboutissent, où se trament toutes les manoeuvres, d'où partent toutes les impulsions". Il propose donc que la conduite du roi soit examinée, les ministres déclarés solidairement responsables, La Fayette sévèrement puni et enfin que l'on proclame la patrie en danger.

10 juillet
Tous les ministres, par la voix du ministre de la Justice, annoncent leur démission, déclarant, dans un rapport à l'Assemblée, qu'il n'est pas "en leur pouvoir de défendre le royaume de l'anarchie qui, dans cet état d'impuissance publique, mençait de tout engloutir".
A Fouesnant, répression d'une émeute par la garde nationale.

11 juillet

L'Assemblée décrète la patrie en danger :
"Des troupes nombreuses s'avancent vers nos frontières. Tous ceux qui ont en horreur la liberté, s'arment contre notre Constitution.

Citoyens, la patrie est en danger.

Que ceux qui vont obtenir l'honneur de marcher les premiers pour défendre ce qu'ils ont de plus cher se souviennent toujours qu'ils sont Français et libres ; que leurs concitoyens maintiennent dans leur foyers la sûreté des personnes et des propriétés ; que les magistrats du peuple veillent attentivement ; que tous, dans un courage calme, attribut de la véritable force, attendent, pour agir, le signaal de la loi, et la patrie sera sauvée".
Dans le même temps, elle rédige deux adresses, l'une pour les civils, l'autre pour l'armée.
De nouvelles pétitions de sections parisiennes sont portées à l'Assemblée, réclamant le retour de Pétion et Manuel.


12 juillet
A l'appel du directoire de l'Ardèche, la garde nationale et des troupes de lignes, menées par le Lieutenant Colonel Murol, libèrent les châteaux de Jalès et de Bannes qu'occupaient les troupes royalistes du comte de Saillans.

25 juillet
Manifeste de Brunswick.

30 juillet
La Marseillaise à Paris.

10 août
La prise des Tuilleries Chute de la royauté. La veille le peuple s'agite : vers 10 et 11 h, des roulements de tambour, signal de ralliement pour les hommes de sections, grondent dans les faubourgs. Ils prennent de l'ampleur d'instant en instant. Les clubs révolutionnaires et des comités de section avaient prévenu les patriotes que le tocsin se mettrait en branle plus tard. Lorsqu'il sonnerait, le moment sera venu de se rassembler afin de participer à l'assaut du château des Tuilleries. - Entre minuit et une heure : Les cloches des églises se mettent à sonner (celle de St Paul, au cœur du faubourg, étant la première), dans les quartiers est de la capitale. Le peuple en arme se met en marche. Sur le Pont-Neuf, des canons placés là pour empêcher la jonction des quartiers St Marcel et St Antoine, et protéger les Tuilleries, sont enlevés sur l'ordre de la municipalité de Paris. Le tocsin, les battements de tambours, le grondement des roues pesantes sur le pavé constituent le bruit de fond de ce jour révolutionnaire. Tout le reste de la journée, il y a des morts du côté des attaquants autant que du côté des gardes suisses qui furent tous massacrés. C'est le début de la terreur.

Massacres de Septembre
Rien de plus ambigu que le cri, lancé à Paris, au mois d’août 1792 : "La patrie en danger !" Le péril est-il à l’intérieur, où de nombreuses perquisitions, chez les prêtres réfractaires, débusquent des agences royalistes et prouvent les complicités épistolaires avec les émigrés? Est-il à l’extérieur, d’où parviennent de sinistres nouvelles: passage de la frontière du duc de Brunswick à la tête de 80 000 hommes; capitulation de Longwy, le 22 août; Verdun menacé? La Commune d’un Paris surchauffé par l’arrivée des Marseillais suit le conseil de Marat: liquider les "traîtres" que sont ces prêtres réfractaires, déclarés suspects par la loi du 27 mai 1792, et la panique des patriotes cessera. Dès le 11 août, la chasse commence; les rafles se multiplient dans les quartiers à forte densité cléricale: Saint-Sulpice et Saint-Germain-des-Prés. Après un interrogatoire sommaire à la section de l’Hôtel de Ville, les suspects, à qui personne ne fait mention du serment, sont jetés pêle-mêle dans des prisons de fortune: 160 aux Carmes de la rue de Vaugirard, 92 au séminaire de Saint-Firmin, d’autres encore à l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés, à la Force, etc. Sur les quelque trois cents prêtres ainsi incarcérés, près de la moitié sont étrangers à la capitale; on y trouve des séculiers, des religieux et même des assermentés qu’on soupçonne d’incivisme. Aux Carmes, une vie communautaire s’improvise autour du vénérable archevêque d’Arles, au domicile parisien duquel on avait saisi une correspondance compromettante avec ses collègues en émigration. On souffre de la promiscuité, d’une atmosphère rendue irrespirable par la population, de la privation de la messe, d’une attente mystérieusement entretenue par des gardes muets sur le sort éventuel des détenus. Le samedi 1er septembre, Paris apprend que les Prussiens ont pris Verdun. Un branle-bas de combat, des cris lointains, la garde doublée maintiennent, toute la nuit, en prières les prisonniers. Le dimanche, en dMassacres de septembreébut d’après-midi, le tocsin sonne à Saint-Sulpice; les sections siègent en permanence; elles recueillent les enrôlements des citoyens, enflammés par la défense des frontières. Sur un ordre, dont on n’établira jamais la source (Danton, alors ministre de la Justice?), les septembriseurs surprennent, aux Carmes, les prisonniers à la promenade: on les refoule dans l’étroit couloir, et le commissaire Violet leur crie: "Allons, Messieurs, deux à deux!...". C’est ainsi qu’ils franchissent le petit escalier du jardin, sans autre forme de procès: les égorgeurs se livrent à une ignoble boucherie et à des sévices raffinés. On parle de deux cents prêtres massacrés dans les autres prisons où la nouvelle se répand comme une traînée de poudre. C’est à l’Abbaye que Maillard, dans la soirée du 2, installe une parodie de tribunal: des 284 prisonniers (clercs et laïcs), tous ceux qui déclarent refuser le serment sont massacrés jusqu’à l’aube. Le 3, à Saint-Firmin, la tuerie est encore plus confuse. Aussi confuse que la foule d’hommes et de femmes qui pille, tue, vole et viole les jeunes prisonnières de la Salpêtrière, dont certaines ont moins de douze ans; hébétés par le sang et par le vin, ils ne s’arrêteront que le 5 septembre, au milieu d’horreurs; la mutilation de la jolie princesse de Lamballe n’est peut-être pas la pire. Le bataillon des Marseillais, parfois mis en cause par des témoins, a sauvé, au contraire, des prêtres et des compatriotes. Alors qui est responsable? Pourquoi cette hystérie collective d’autant plus troublante qu’elle se répète à Meaux, à Provins et ailleurs? Le procès des septembriseurs, commencé peu après, n’apporte aucun éclaircissement satisfaisant, et toutes les hypothèses demeurent permises. Deux certitudes se dégagent néanmoins. La première porte sur le bilan officiel des victimes parisiennes. Le Comité de surveillance les estime à 1 100 sur 2 637 détenus parisiens. Sur les 1 100, il y a environ 260 ecclésiastiques: 115 aux Carmes (qui ont été béatifiés en 1926), 76 à Saint-Firmin, 22 à l’Abbaye; les autres se répartissent entre les prisons où dominaient les nobles et les condamnés de droit commun. La seconde certitude est que les prêtres ne se sont vus que rarement placés devant l’alternative: le serment ou la mort. Ils ont fait plutôt figures d’otages politiques, que des républicains se proposaient encore d’échanger, au matin du 2 septembre. La psychose de «trahison de l’intérieur» les a désignés comme représentants de cette classe du clergé liée par des intérêts multiples avec la noblesse prête à écraser la Révolution. Il faudra la composition polémiste de l’abbé Barruel, déjà réfugié à Londres, pour accréditer auprès de l’Europe, dès le début de 1793, la thèse selon laquelle les prêtres auraient été exécutés "en haine de la foi" pendant ces journées, particulièrement aux Carmes, où les récits persistent à placer le «tribunal» de Maillard exigeant le serment avant de livrer les victimes aux sectionnaires.

20 septembre
Bataille de Valmy, réunion de la Convention.

début >> 1793