1794

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- en cours de rédaction -

Février
Rapport de Robespierre sur les principes de morale politique (apologie de la vertu et de la Terreur).

Mars
Condamnation à mort des Hébertistes.

Avril
Exécution de Danton, de Desmoulins et des dantonistes.

8 juin
Fête de l'Etre suprême.La fête de l'Être suprême
Robespierre est à l’origine du culte de l’Être suprême, par lequel il prétendait donner à la vertu, principe et ressort du gouvernement populaire, un fondement métaphysique. L’essentiel de ses idées est contenu dans son discours du 18 floréal an II (7 mai 1794) sur l’établissement des fêtes décadaires: «L’idée de l’Être suprême est un rappel continuel à la justice, elle est donc sociale et républicaine.» L’article premier du décret du 18 floréal proclame que «le peuple français reconnaît l’existence de l’Être suprême et de l’immortalité de l’âme». Quatre grandes fêtes républicaines étaient instituées à la gloire des grandes journées de la Révolution: 14 juillet 1789, 10 août 1792, 21 janvier 1793 et 31 mai 1793. La fête de la Nature et de l’Être suprême inaugurait le nouveau culte, le 20 prairial an II (juin 1794). La cérémonie comporta deux épisodes. Aux Tuileries, devant le pavillon central couronné d’un gigantesque bonnet rouge, se dressait devant un amphithéâtre de verdure une statue de l’Athéisme en étoupe, où nichait une statue de la Sagesse, incombustible. Après la canonnade, les fanfares, les chœurs de l’Opéra entonnèrent l’hymne: «Père de l’univers, suprême intelligence...», puis Robespierre, président de la Convention, fit un discours et mit le feu à la statue de l’Athéisme, la Sagesse sortit intacte des flammes. On se rendit ensuite au Champ-de-Mars, préparé pour la circonstance: on y voyait une montagne symbolique, une colonne de cinquante pieds, quatre tombeaux étrusques, une pyramide, un temple grec et un autel. Un tableau de Pierre-Antoine Demachy représente la cérémonie. Le cortège vint se promener dans ce décor allégorique et, sur un dernier «Père de l’univers, suprême intelligence...», éclata une formidable canonnade qui mit fin à la cérémonie. La fête de l’Être suprême fut l’apothéose de Robespierre. Porte-drapeau de la Révolution, il en était apparu comme le maître, précédant les députés d’une vingtaine de pas. Mais cela permit à ses ennemis de le perdre en l’accusant de viser à la dictature. Enfin, cette cérémonie ne fut pas du goût de tous les Montagnards, qui accusèrent Robespierre de calotinisme.

27 juillet
La Convention décrète l'arrestation de Robespierre qui est exécuté avec Saint-Just le 28.
Robespierre ­ mourant ­ est guillotiné. La riche bourgeoisie est satisfaite, les royalistes relèvent la tête, les « terroristes » respirent. La Révolution est, en fait, terminée. Dans la journée qui suivit l'exécution de Robespierre, la guillotine fonctionna à plein régime. Le 11 thermidor du calendrier révolutionnaire, pas moins de soixante-dix membres de la Commune de Paris ­ tous partisans de Robespierre dûment répertoriés ­ furent exécutés. Ce 28 juillet 1794 constitua ainsi le jour le plus sanglant de la Révolution. Au total, cent six personnes furent les victimes du complot légal perpétré par la coalition des ennemis de l'Incorruptible. Cette coalition était particulièrement hétéroclite. Elle réunissait des révolutionnaires fort modérés représentant la moyenne et la riche bourgeoisie, d'anciens partisans de Danton ou d'Hébert, des représentants en mission « terroriste » sanctionnés par Robespierre pour cause de cruauté ou de prévarication. Cela faisait évidemment beaucoup de monde... Même les « sans-culottes » n'étaient plus aussi Arrestation de Robespierrefavorables à l'Incorruptible et ce à cause du maximum, la fixation autoritaire du salaire. Lorsque ­ après la chute de Robespierre ­ le maximum fut aboli, leur situation se dégrada bien plus... A la veille du 9 thermidor, Robespierre apparaît comme l'homme le plus puissant de la Révolution. Pourtant, cinq ans auparavant, il était totalement inconnu du peuple parisien. Quatre jours après son élection à la présidence de la Convention, Robespierre conduit la procession de la première fête de l'Être suprême. Un mois auparavant, l'Incorruptible avait fait adopter par la Convention le décret suivant : « Le peuple français reconnaît l'existence de l'Être suprême et l'immortalité de l'âme ». Cette fête de l'Être suprême avait suscité des réactions diverses... Robespierre avait heurté le courant athée sans pour autant satisfaire les chrétiens. Nombre de Conventionnels avaient cru percevoir dans cette initiative une volonté de pouvoir personnel. Le malaise ambiant ne pouvait que croître deux jours plus tard lorsque Couthon, autre ami de Robespierre, avait fait voter la célèbre loi du 22 prairial concernant les « ennemis du peuple ». Sont réputés ennemis du peuple ceux qui auront « provoqué le rétablissement de la royauté..., cherché à avilir ou dissoudre la Convention nationale et le gouvernement révolutionnaire et républicain dont elle est le centre ». Mais aussi ceux qui auront cherché « à dépraver les moeurs, à altérer la pureté et l'énergie des principes révolutionnaires... ». Ce texte avait de quoi inquiéter à peu près tout le monde. Il est vrai que les armées de la Révolution étaient à la peine, le pays toujours menacé par l'Europe monarchique. Au plan intérieur, cette loi visait selon toute vraisemblance quelque 300 000 propriétaires terriens opposés à la Révolution ou soupçonnés de l'être dont les terres pourraient ensuite être distribuées aux plus pauvres... En tous les cas, l'on assista à une aggravation de la Terreur. Jusqu'en juin 1794, le Tribunal révolutionnaire de Paris avait ordonné 1251 exécutions. Du 10 juin au 27 juillet, 1376 personnes furent exécutées. Fouquier-Tinville, son grand homme, déclara : « Les têtes tombaient comme des ardoises ». Le peuple eut « la nausée de l'échafaud ». Pendant ce temps, l'on conspire. Se retrouvent dans une même aversion pour Robespierre des hommes sanguinaires ou corrompus, anciens représentants en mission tels que Tallien ou Fouché, Fréron ou Barras, des anciens dantonistes, quelques hébertistes rescapés. Tout ce petit monde complote et met à profit les inquiétudes des députés de la Plaine ou du Marais qui constituent l'immense majorité de la Convention. Ajoutons à cela que le Comité de salut public ne comprend pas que des partisans de Robespierre et que le Comité de sûreté générale lui est majoritairement défavorable. Le 8 thermidor, Robespierre prend la parole à la Convention d'où il a été absent plusieurs semaines durant. Discours très offensif qu'il conclut en ces termes : « Disons qu'il existe une conspiration contre la liberté publique ; qu'elle doit sa force à une coalition criminelle qui intrigue au sein même de la Convention ; que cette coalition a des complices dans le Comité de sûreté générale et dans les bureaux de ce Comité qu'ils dominent ; que les ennemis de la République ont opposé ce Comité au Comité de salut public et constitué ainsi deux gouvernements ; que des membres du Comité de salut public entrent dans ce complot ; que la coalition ainsi formée cherche à perdre les patriotes et la patrie ». Robespierre conteste avec force l'accusation de dictature : « Ils m'appellent tyran. Si je l'étais, ils ramperaient à mes pieds. Je les gorgerais d'or, je leur assurerais le droit de Saint Justcommettre des crimes, et ils seraient reconnaissants (...). Je suis fait pour combattre le crime, non pour le gouverner. Le temps n'est point arrivé où les hommes de bien peuvent servir impunément la patrie : les défenseurs de la liberté ne seront que des proscrits, tant que la horde des fripons dominera ». D'abord follement acclamé, l'Incorruptible est ensuite pris à partie, désavoué. Surtout, il lui est demandé de désigner nommément ceux qu'il dénonce, ce qui, naturellement, rassurerait tous les autres. Robespierre s'y refuse : erreur fatale. Le soir même, il se rend au club des Jacobins. Robespierre lit à nouveau son discours. Enthousiasme des Jacobins. Vers minuit, assuré de son pouvoir, Robespierre rentre tranquillement chez lui. Pendant qu'il dort, Fouché, lui, agit, tisse les ultimes fils de la conspiration. Le lendemain, vers midi, Saint-Just monte à la tribune de la Convention. Il est immédiatement interrompu par Tallien. Billaud-Varenne relaie celui-ci dans ses accusations contre la « tyrannie » de Robespierre. Robespierre tente d'intervenir. Vacarme, insultes. Finalement, Robespierre, Saint-Just, Couthon et le frère de Robespierre sont arrêtés, emprisonnés. La Convention a également voté l'arrestation du président du Tribunal révolutionnaire, Dumas, et du commandant en chef de la Garde nationale, Hanriot. En quelques heures, la Révolution va basculer. D'abord, la Commune de Paris passe à l'insurrection et délivre les prisonniers qui se réfugient à l'Hôtel de Ville. Mais Hanriot n'arrive qu'à rallier une minorité de sections parisiennes. Robespierre semble frappé de léthargie : croit-il vraiment que la Convention va changer d'avis, solliciter son pardon ? En tous les cas, il n'en est rien. Barras, chargé par la Convention de rassembler les sections les plus modérées, encercle l'Hôtel de Ville dans la nuit du 9 au 10 thermidor. Robespierre est capturé, la mâchoire fracassée (tentative de suicide ou coup de pistolet du gendarme de dix-neuf ans, Merda ?) avec le dernier carré de ses partisans. Le 28 juillet, à cinq heures et demie de l'après-midi, on fait monter vingt-deux condamnés à mort dans trois charrettes. Pour se rendre du palais de justice à la place de la Révolution, le cortège mettra une heure et demie. Robespierre le jeune et Couthon sont mourants, l'Incorruptible est presque aussi mal en point. Sur leur passage, des « personnes de la meilleure classe » manifestent bruyamment leur joie. Dans les faubourgs ouvriers, les gens sont restés chez eux : « Les faubourgs boudaient mais ne bougeaient pas ». Au terme du voyage, à vingt-deux reprises, le couteau de la guillotine s'abat... C'est la fin de la Terreur ? C'est surtout la fin de la Révolution. L'historien Louis Saurel énumère les cinq effets majeurs de la chute de Robespierre : le retour au pouvoir de la bourgeoisie d'affaires ; la fin de la République démocratique et égalitaire avec, entre autres, le remplacement du suffrage universel par le suffrage censitaire ; la fin de la surveillance du commerce et de l'industrie par l'État ; la résurrection du parti royaliste ; le glissement vers le césarisme : Bonaparte est dans l'antichambre du pouvoir…

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